Les jours du patron du Département de renseignement et de sécurité, le général-major Mohamed Mediène, sont comptés. C’est ce qui ressort des salons feutrés et capitonnés de la capitale algérienne. L’énigmatique général «Tewfik», qui maniait les cigares cubains comme les leviers de commande au palais présidentiel El Mouradia, à Alger, n’a presque plus que les yeux pour pleurer. Il vient de se voir retirer sa dernière cartouche par le vice-ministre algérien de la Défense, chef d’état-major de l’ANP (Armée nationale populaire): le Groupement d’intervention spécial, plus connu sous le sigle de «GIS», considéré comme l’épine dorsale de la structure globale de la sécurité nationale.
Un dernier clou planté au cercueil de celui qui faisait la pluie et le beau temps de l’Algérie, réduit actuellement à ce statut peu reluisant de paria de l’establishment militaro-politique algérien.
Le GIS, qui a été créé par le général Lakhel Ayat Mejdoub, avant d’être renforcé dans les années quatre-vingt par le général Mohamed Betchine, passe désormais sous le commandement du général-major Gaïd Saleh, l’un des plus fidèles des fidèles du clan Bouteflika (Abdelaziz et Saïd Bouteflika, conseiller auprès de la présidence algérienne mais vrai détenteur du pouvoir décisionnaire).
En soustrayant ce département hypersensible de la sécurité algérienne au général-major «Tewfik», le clan présidentiel aura ainsi parachevé l’œuvre de désarmement du patron du DRS. Il en ressort que ce dernier coup n’est que le résultat d’un processus patient de mise à mort de Mohamed Médiène.
L’on se rappelle que, depuis le retour en 2014 du président Bouteflika de son long séjour à l’hôpital du Val de Grâce, à Paris, où il se faisait traiter d’un fâcheux AVC, le général Tewfik n’a eu de cesse d’essuyer les revers les plus violents de sa carrière.
Tout commence par le limogeage de son homme lige, le colonel Fawzi, alors chef du service presse du DRS et son remplacement par le colonel Okba qui était du moins étranger au monde des médias. Le général Tewfik s’est vu ainsi tirer le tapis (médiatique) sous ses pieds, lui qui a pesé de tout son poids auprès d’une presse algéroise «embedded» pour cultiver son image iconique de «l’homme fort» de l’Algérie.
S’ensuit un coup fourchu encaissé sans que l’ex-lauréat du KGB où il a fait ses premières armes du temps de l’ex-URSS puisse bouger le petit doigt: la soustraction de la Direction centrale de la sécurité de l’armée que dirigeait le général M’Henna Djebbar, autre fidèle du général-major «Tewfik». Là encore, ce dernier a vu ce département lui filer entre les doigts sans broncher.
Dans cette foulée de coups de Jarnac, le patron du DRS se voit aussi se soustraire de ses prérogatives le service judiciaire qui a été rattaché à la Direction du personnel et de la justice militaire.
Voilà où le bât blesse. C’est par ce service justement que le patron du DRS s’est attiré cette pluie d’ennuis avec le clan présidentiel. Les enquêtes diligentées par ce service sur les affaires de corruption n’étaient pas pour plaire à un clan présidentiel corrompu jusqu’au bout des ongles.
Le général «Tewfik» ne savait peut-être pas qu’en ouvrant cette boîte de Pandore, il allait ouvrir les portes de l’enfer qui emportent l’un de ses grands soutiens: le général-major Rachid Laalali dit Attafi a été débarqué de la tête de la Direction de la documentation et de la sécurité extérieure, pour être remplacé par le général Mohamed Bouzit dit Youcef, un homme de confiance du chef d’état-major de l’ANP, Gaïd Salah.
Et ce n’est pas tout. Au tout début de 2014, le président Bouteflika, qui s’est rendu compte que les hauts galonnés du DRS avaient pris les rides de l’âge, exhume des fins fonds de la loi un article fixant l’âge du départ à la retraite. Pas moins de 55 officiers supérieurs seront remerciés d’un seul coup. Le Général-major «Tewfik» ne se serait jamais senti aussi seul.
Le retrait du GIS maintenant vient enfoncer le clou. Le dernier à être planté au cercueil du désormais (défunt) patron du DRS.