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Bébé, bug et surbooking

Si la plupart d’entre vous reviennent enchantés de leurs vacances, d’autres ne veulent plus en entendre parler. C’est le cas de la famille Seksek. Elle comptait se reposer quinze jours en août dans les Cyclades, à moindres frais. La destination est relativement bon marché. En outre, la famille avait réservé un appartement « où faire la cuisine », par souci d’économie.

Dès le mois de mars, Gaëlle, la mère, se rend dans une agence de voyages pour effectuer les réservations, de Paris à Athènes, puis d’Athènes à Naxos. « J’aurais voulu faire l’ensemble du voyage sur une seule compagnie, en l’occurrence Olympic Air, qui assure la desserte intérieure grecque, mais il n’y avait plus de places. J’ai donc dû prendre Air France pour le premier trajet, et Olympic Air pour le deuxième. » Elle achète cinq billets : deux pour les adultes, deux pour les enfants de 7 et 8 ans, et un pour le bébé de 8 mois.

Le départ est prévu le 1er août, à 7 h 15, avec une correspondance à 14 heures. « Nous avons essayé de nous préenregistrer sur Internet, mais cela ne nous a pas été possible, à cause du bébé », explique Mme Seksek.

L’enregistrement en ligne, trente heures avant le vol, permet de confirmer sa présence, de choisir son siège et d’obtenir sa carte d’embarquement, sans avoir à faire la queue à l’aéroport. Le passager préenregistré n’a plus qu’à déposer ses bagages et à se rendre en salle d’embarquement.

La famille se lève tôt, pour être présente à l’aéroport de Roissy-Charles-de-Gaulle à 5 h 30 du matin, mais il y a déjà beaucoup de monde. « Nous avons dû faire la queue pendant une heure, seuls trois guichets étant ouverts », indique Mme Seksek.

SURBOOKING

Lorsqu’ils parviennent à un comptoir, une hôtesse leur annonce que l’embarquement est terminé : il n’y a plus de places dans l’avion. « Nous comprenons que nous sommes victimes de surbooking . » Cela signifie que la compagnie a vendu plus de places qu’il n’y en a réellement – une pratique courante, destinée à compenser les absences de certains voyageurs et à rentabiliser les vols.

L’hôtesse, voyant toutefois qu’il y a un bébé, et que la famille doit prendre un autre avion, estime qu’il sera sans doute possible de demander à des passagers sans correspondance de laisser leur place. « La plupart étaient des jeunes qui auraient sans doute accepté, moyennant un petit dédommagement », estime Mme Seksek. L’hôtesse leur tend donc leurs cartes d’embarquement.

Ils courent jusqu’à la porte de l’avion. Mme Seksek explique au steward l’urgence de la situation et la solution proposée par l’hôtesse. Celui-ci estime qu’il est trop tard pour tenter un appel. « Il ne me regardait même pas, il se fichait complètement de notre problème », se plaint la mère de famille.

Les enfants, comprenant qu’ils ne partiront pas, fondent en larmes, le bébé les imite. « Arrêtez de faire pleurer vos enfants ! », lance le steward aux parents. Ils retournent au comptoir, bébé dans les bras – sa poussette étant partie dans la cale avec les bagages.

Air France les fait embarquer sur le vol suivant. Mais leur correspondance est fichue. « Air France s’en moque, puisque ce n’est pas elle qui est responsable du deuxième trajet », proteste Mme Seksek.

CASCADE DE CATASTROPHES

Arrivés à l’aéroport d’Athènes, ils filent dans une agence de voyages, afin de réorganiser leur périple. On les prévient que, du fait de leur absence sur le vol Athènes-Naxos d’Olympic Air, ils se sont rendus coupables de « no-show » (non-présentation), et qu’ils n’auront pas le droit de prendre le vol retour. Ils doivent donc racheter cinq billets de retour Naxos-Athènes…

L’agence constate qu’il n’y a plus de vols disponibles, dans l’immédiat, pour se rendre sur l’île. Quant aux ferrys, qui font le trajet en sept heures, au lieu de quarante-cinq minutes, ils sont eux aussi complets.

Il leur faudra attendre quatre jours pour obtenir des places « non numérotées », permettant de voyager assis sur un siège – ou par terre. « Nous avons pris un hôtel à bas prix dans la banlieue d’Athènes, mais nous avons dû manger au restaurant. Nos frais supplémentaires se sont montés à près de deux mille euros ! Je n’en ai pas dormi pendant plusieurs nuits », se souvient Mme Seksek.

Pour le surbooking, Air France les a indemnisés de 1 000 euros, soit 250 euros pour quatre personnes. On peut s’en étonner, dans la mesure où la réglementation européenne prévoit un dédommagement de 400 euros au-dessus d’une distance de 1 500 kilomètres. Or, entre Paris et Athènes, il y a plus de 2 000 kilomètres. En outre, il y avait cinq billets – et non quatre.

CASCADE DE CATASTROPHES

La famille ayant déposé un message sur notre blog « SOS conso », nous avons contacté le service de presse d’Air France. Celui-ci admet que la cascade de catastrophes ne se serait pas produite s’il avait été possible pour la famille de se préenregistrer.

« Il y a un bug informatique, sur lequel nous travaillons, et que nous envisageons de corriger fin 2013 », explique Jean-François Darbier, le « chef de produits familles » de la compagnie.

Un bug d’autant plus étrange que, la plupart du temps, le bébé voyage sur les genoux d’un parent. « En attendant, pour empêcher que les familles avec bébé soient systématiquement victimes de surbooking, nous avons mis en place une « task force » qui leur assigne des places quarante heures avant le vol », ajoute-t-il, désolé du fait que celle-ci soit passée entre les mailles du filet.

Il nous assure d’ailleurs qu’Air France transporte sans dommages 490 000 bébés par an. Le service client s’est engagé à réexaminer le dossier et à faire un geste commercial.

http://sosconso.blog.lemonde.fr/

1 réponse sur « Bébé, bug et surbooking »

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